Quel rôle joue la DDFiP 77 depuis le début de la crise sanitaire ?
Elle a été un accélérateur de résilience. Durant cette période où les hôpitaux étaient mobilisés et où les mairies devaient faire face, nous avons assuré sans défaillance la paie des soignants, des médecins, des employés communaux et d'autres. Même chose avec les intercommunalités, les départements et les entreprises qui travaillaient pour eux. Dans une période de ralentissement général, nous avons permis que les prestataires de ces entités publiques soient payés au plus vite. Cet argent frais était le bienvenu pour les entreprises. Dans le même temps, nous avons continué à effectuer nos missions comme le lancement de notre campagne sur l'impôt sur le revenu et l'encaissement de la TVA. On a pu ainsi alimenter le budget de l'Etat, car dans ce genre de situation, tout peut se gripper.
Pouvez-vous tirer un premier bilan de toutes ces aides apportées aux entreprises ?
À ce jour, le fonds de solidarité représente 379 millions d'euros qui ont bénéficié à 34 000 entreprises, soit un tiers des 90 000 entreprises du département. Ce sont surtout des petites structures qui se sont retrouvées à l'arrêt, mais aussi celles fermées administrativement dans les secteurs de l'hôtellerie, de la restauration, du tourisme, du commerce et des transports publics. Il a fallu monter tout de A à Z et se réinventer. Nous, qui sommes là pour asseoir l'impôt, le recouvrer et le vérifier, nous avons mis tout notre savoir-faire pour distribuer des subsides. Il y a eu aussi les prêts garantis d'Etat avec 2 milliards et 350 millions d'euros accordés à 11 650 entreprises. Ils représentent une facilité de trésorerie, mais ce sont des emprunts qui ont vocation à être remboursés. Le taux de chute est difficile à préciser. Ce qui est certain, c'est qu'on a parfois affaire à des entreprises ‘'zombies''. Elles étaient en difficulté au début de la pandémie, mais ont réussi à traverser cette période grâce aux aides de l'Etat qui se sont substituées aux recettes qu'elles n'avaient plus. Si ces entreprises ne réussissent pas à se relever, l'argent public aura été dépensé en vain. Mais il aura quand même permis d'aider des chefs d'entreprise et leurs salariés. En soi, c'est une bonne chose. Cette crise est aussi l'occasion de se réinventer grâce au plan de relance et à ses dispositifs foisonnants. Certaines entreprises ont relocalisé des activités et d'autres ont essayé de trouver des marchés à l'exportation.
Vous avez comparé récemment ces aides à de la « mauvaise graisse ». Pourquoi ?
Il ne faut pas profiter d'une aide en se disant ‘'je ne change rien et demain, je vais repartir comme si de rien n'était''. Non, cet argent, il faut savoir bien l'utiliser comme s'équiper en informatique par exemple. Beaucoup d'entreprises ont créé des sites marchands, ont mis leurs salariés au chômage partiel ou ont investi dans le télétravail. À la DDFiP 77, avant la pandémie, on avait 325 télétravailleurs sur nos 1400 agents. Aujourd'hui, nous en sommes à 1 180, soit un taux d'équipement de 88 %. On aurait pu se contenter de vivre sur nos acquis, mais on a essayé de capitaliser et on s'est servi de cette période pour accélérer notre dispositif de travail à distance. Tout cet argent investi doit être le plus productif possible pour qu'il ne fasse pas de la mauvaise graisse, mais du muscle.
Avez-vous eu des retours des tribunaux de commerce qui pourraient vous rendre inquiet ?
Pas pour l'instant, ce qui est un peu paradoxal. En fait, les mises en liquidation judiciaire ont beaucoup baissé en 2020, mais les difficultés sont devant nous, car les aides publiques ont gelé la situation. Au lieu de déposer le bilan, certaines entreprises ont perçu ces aides comme un chiffre d'affaires. Je préside le comité des chefs de services financiers avec ma collègue de l'Urssaf. Les entreprises viennent nous demander des délais de paiement, mais nous n'en avons pas vu plus qu'avant. C'est la même chose au niveau départemental avec le Codefi (Comité départemental d'examen des difficultés des entreprises). Mais cela ne signifie pas qu'il n'y a pas de difficultés. Fin avril, le dispositif dit des « coûts fixes » a été mis en place. Il permet de prendre en charge jusqu'à 90 % des charges fixes des entreprises. Le but n'est pas de les engraisser, mais de leur permettre de passer le cap jusqu'à une reprise normale de leur activité.
Les facilités de paiement des impôts et des cotisations sociales se sont-elles poursuivies ?
Oui, il y a eu des reports automatiques de paiement à l'initiative de l'Urssaf. S'agissant de l'administration fiscale, dès lors qu'on nous le demande, nous avons la possibilité d'accorder des délais. Pour le département, en matière fiscale uniquement, cela doit représenter plus de 108 millions d'euros de créances qui ont été repoussées de quelques mois. C'est toujours vrai aujourd'hui.
Comment s'est traduite la baisse des impôts de production ?
Elle représente 20 milliards d'euros sur deux ans. C'est un process qui est lancé et les prochaines déclarations de CVAE (cotisations sur la valeur ajoutée des entreprises) et les acomptes qui vont être versés tiendront compte de cette baisse.
De quelles armes disposez-vous pour lutter contre les fraudeurs ?
Comme dans tout dispositif d'aides, il y a des profiteurs de guerre et même des réseaux mafieux. C'est notamment vrai pour le chômage partiel. Pour le fonds de solidarité, on a eu quelques indices de fraude. Ce fonds représente 23 milliards d'euros, ce qui n'est pas une paille. On a donc essayé d'effectuer un écrémage en mettant en place des contrôles de plus en plus systématiques qui ont permis d'éliminer beaucoup de fraudeurs. Aujourd'hui, avec la montée en gamme des aides publiques, on se montre plus vigilants pour éviter que cet argent aille dans de mauvaises poches.
Concernant les particuliers, quel effet a eu la suppression progressive de la taxe d'habitation ?
Pour 80 % des foyers non imposables, cette suppression est réalisée totalement. Nous sommes un département ‘'riche'' en termes de population fiscale. Nous avons donc moins de non imposables que dans d'autres départements pour des raisons sociologiques. Cette suppression représente un gain moyen de 748 euros par foyer fiscal. Cette année, les foyers imposables vont en bénéficier aussi, puisqu'un tiers de leur taxe d'habitation va être supprimé.
Quel est le premier bilan du prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu instauré en 2019 ?
C'est une réforme géniale qui est arrivée à temps. Elle a permis à l'impôt de s'adapter au jour le jour à la baisse de revenus provoquée par la crise sanitaire. Avant, celui qui se retrouvait au chômage ou au chômage partiel et qui avait perdu 20 % de ses revenus devait attendre septembre pour retomber sur ses pieds. Là, dès avril 2020, son impôt a été ajusté. On a réussi à s'adapter en temps réel à l'évolution des revenus. L'autre avantage de ce prélèvement, c'est qu'on peut impacter une baisse de l'impôt sur l'acompte ou sur les mensualités. Un gouvernement, qui veut donner du pouvoir d'achat, peut le faire d'un mois sur l'autre. Il y a un effet immédiat.
Avez-vous l'impression d'avoir convaincu les sceptiques ?
Ils étaient surtout craintifs, mais de bonne foi. L'une des difficultés du prélèvement à la source, et l'un de ses atouts d'ailleurs, c'est qu'il rend les contribuables acteurs. Vous pouvez effectuer directement des modifications sur votre compte. Plutôt que d'attendre de recevoir un avis d'imposition, on peut interagir. Je n'ai pas de chiffres concernant les réclamations, mais je pense qu'elles sont en baisse. Il y a eu une baisse de fréquentation à nos guichets de 40 % et un numéro de téléphone unique (0 809 401 401) a été institué cette année. Le prélèvement à la source est un grand succès. Il y a eu, évidemment, quelques problèmes d'ajustement, mais pas de couacs.
Que pouvez-vous dire sur l'actuelle déclaration de revenus ?
Il y a peu de nouveautés. C'est la deuxième année qu'on instaure la déclaration automatique. Cela signifie que si vous considérez que tout ce qui est inscrit sur votre déclaration est exact, vous pouvez vous abstenir de la renvoyer ou de la télédéclarer. Vous serez alors imposé comme si vous aviez effectué votre déclaration. Cette année, il y a dix millions de déclarations qui peuvent être engrangées directement.
Avez-vous apporté une retouche aux crédits d'impôt ?
Nous sommes en train d'expérimenter un système contemporain sur les emplois à domicile pour faire en sorte que les employeurs n'avancent pas la part qui sera remboursée ultérieurement. En fonction des calculs de l'année précédente, on pourra savoir si votre cotisation entre ou pas dans votre crédit d'impôt.
Comment s'opère la fermeture des petites trésoreries au profit de la création des structures France Services ?
J'ai rencontré les élus concernés par ces fermetures. Il ne s'agit d'ailleurs pas vraiment de fermeture, car elles étaient agrégées à des trésoreries plus importantes qui rendaient exactement le même service. Mais les gens ont pensé que des guichets disparaissaient. En 2019, nous avions 61 structures et nous étions présents sur 23 communes. En 2023, nous serons présents dans 12 communes, mais il faudra ajouter les 30 France Services qui seront installées sur le territoire à ce moment-là. Nous serons donc présents dans 42 communes.
Quelle est la plus-value de ce nouveau dispositif et des conseillers numériques recrutés actuellement ?
On est capable d'offrir aux usagers un service complet délivré par des personnes habitant le territoire. Ce sont leurs grands-parents, leurs parents, leurs frères et sœurs qu'elles reçoivent. Il y a donc de l'empathie et la réponse apportée est globale contrairement à ce qu'on peut trouver à un guichet des finances publiques. On est sur du vécu. C'est une façon d'être encore plus présent sur le territoire. Ce qu'on appelle le nouveau réseau de proximité offre aussi la possibilité d'effectuer des démarches chez les débits de tabac affiliés à la Française des Jeux. On passe de nos 23 communes à plus d'une centaine de points de contact. Les syndicats s'opposent à ce que l'usager aille dans les tabacs pour payer ses impôts, ses amendes ou sa cantine. Mais si vous dites à un usager que dans le département, il y a plus de 195 bureaux de tabac ouverts du lundi au samedi jusqu'à 20 h et même plus tard parfois, ce n'est que du confort pour lui. Il va voir son intérêt. Avec ces solutions, on s'est rapproché de l'usager. Sur internet, la démarche reste la même : on dématérialise pour un service disponible 24 h/24 et le plus simple possible. C'est comme cette nouveauté en faveur des travailleurs individuels. Avant, ils devaient déclarer à la fois leurs cotisations sociales et leurs revenus fiscaux. Désormais, ils peuvent passer uniquement par la DDFiP 77 qui se charge d'acheminer les informations vers l'Urssaf. Cette grande simplification concerne plus de deux millions de contribuables. On passe d'un service public à un service au public.
Ses missions et ses services
La direction départementale des Finances publiques de Seine-et-Marne (DDFiP 77) exerce ses missions auprès des particuliers, des entreprises et des collectivités locales. Elle assure le calcul, le contrôle et la collecte des impôts et taxes, l'exécution des recettes et dépenses de l'État, la gestion des comptes des collectivités et des établissements publics, la gestion des biens domaniaux et la tenue du plan cadastral.
Au 1er janvier 2021, les services territoriaux de la DDFiP 77, principalement organisés en fonction des publics servis, consistent en 11 services des impôts des particuliers (SIP), 11 services des impôts des entreprises (SIE), 12 trésoreries ou services de gestion comptable et trois services de publicité foncière. Plusieurs autres services spécialisés viennent en soutien de ce réseau, notamment en matière de contrôle fiscal ou de cadastre. La DDFiP77 est, par ailleurs, un membre historique du réseau des Maisons France Service créé en 2019.