AccueilDroit & chiffreActualitéBruno Dalles, CDG 77, « Donner une vraie place au droit et à la justice »

Bruno Dalles, CDG 77, « Donner une vraie place au droit et à la justice »

Ce haut magistrat, au CV brillant et aux convictions affirmées, est de retour en Seine-et-Marne. Depuis janvier, Bruno Dalles, 54 ans, a rejoint le Centre de gestion de la fonction publique territoriale de Seine-et-Marne (CDGFPT 77), basé à Lieusaint. L'ancien procureur de la République de Melun (2010-2015), qui a également dirigé Tracfin (2015-2019), la cellule du ministère de l'Economie et des Finances chargée de la lutte contre la fraude fiscale, le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme, y occupe la fonction de référent déontologie et laïcité. Un renfort de choix pour le CDG 77.
Bruno Dalles, CDG 77, « Donner une vraie place au droit et à la justice »
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Pourquoi avez-vous accepté la proposition du Centre de gestion de Seine-et-Marne ?

La capacité de conviction de la présidente, Anne Thibault, mais surtout de la directrice générale, Chrystel Leclerc, que je connais depuis longtemps, a fait que je n'ai pas pu dire non. En tant qu'ancien procureur de la République de Melun, j'avais également gardé un bon souvenir du territoire et de mes relations avec les élus. J'avais participé aussi à des actions de sensibilisation et de formation sur la laïcité. Je trouvais normal de participer à l'explication et à la défense des valeurs de la République, surtout lorsqu'il y a, en filigrane, des questions d'ordre pénal, au-delà de l'éthique et de la laïcité. Enfin, depuis plusieurs années, je me suis engagé sur des sujets de transparence, de conformité et de régularité, notamment en tant que directeur de Tracfin. Cette proposition était donc intéressante, parce qu'elle permet, dans une zone géographique précise et un domaine déterminé, de passer de la conception à la mise en œuvre d'actions concrètes. De la même façon, le thème de la laïcité va prendre une place importante à l'avenir. Il y a une attente, mais aussi un certain flou et je souhaitais participer à cette clarification. D'autant que ces missions relèvent de l'intérêt général et du service public, pour lesquels j'ai toujours travaillé. Je trouve intéressant que les agents de petites collectivités territoriales, qui se sentent un peu isolés, puissent en bénéficier.

Que représente le CDG 77 pour vous ?

Quand j'étais procureur de la République, le Centre de gestion m'avait déjà sollicité pour la formation, le recrutement et le statut des polices municipales. Ayant enseigné ces sujet pendant dix ans à Sciences-Po Paris, je connaissais les structures de formation et de concours. En revanche, sur le reste des missions, notamment les sujets de médecine, de prévention, etc., j'ai découvert que le champ des compétences était large. Le CDG 77 est une structure dynamique, mais qui a besoin de communiquer en interne et en externe, afin de mieux se faire connaître. Il est encore trop marqué par son côté organisateur de concours.

Vous considérez-vous comme un consultant ?

Ce terme ne me convient pas vraiment, car il est un peu étranger à la notion de service public . Mais si vous désignez une mission de conseil, vous avez totalement raison. C'est aussi une mission d'expertise. L'élément qui fonde ce dispositif, c'est la confiance, ce qui nécessite notamment une structure impartiale et indépendante.

Quelles sont vos missions ?

Il existe, depuis janvier, une fonction de référent déontologie et de référent laïcité, dont j'ai la charge. Parallèlement, la loi Sapin II a créé le lanceur d'alerte. Mais dans la fonction publique territoriale, on parle d'un référent alerte éthique, qui a un statut différent. Enfin, il existe un autre dispositif, issu d'un décret du 13 mars 2020, qui concerne le signalement d'actes de violence, de discrimination, de harcèlement et d'agissements sexistes dans la fonction publique. Mais son champ est limité, alors que celui de l'alerte et de l'éthique est plus large. La quasi-totalité de ces thèmes correspond à des qualifications pénales. Le vrai sujet, c'est donc : plainte ou signalement, avec un registre qui doit être mis en place dans toutes les collectivités territoriales. Si le Centre de gestion souhaite que le référent déontologie puisse assurer cela, nous devons en fixer le cadre. C'est une fonction à approfondir.

À quels cas avez-vous déjà été confronté ?

Pas énormément pour l'instant, mais cela va surtout concerner le cumul d'activités. Par exemple, un fonctionnaire territorial veut exercer aussi dans l'enseignement, cela ne pose pas de problème. En revanche, des questions peuvent se poser, lorsqu'un agent territorial souhaite également avoir une activité privé. Il y a aussi des sujets de prévention de conflits d'intérêt par rapport à des projets de reconversion ou d'évolution professionnelle. On peut également prendre le cas du cadre territorial qui voudrait travailler dans une grande entreprise ou dans un organisme qui gère l'eau, l'électricité, etc. La question est “Est-ce possible ?” Nous avons aussi des questions qui ne relèvent pas de notre domaine de compétences, car elles sont statutaires : je suis en CDI et on me met en CDD. Ce problème relève des ressources humaines. Il faut donc réorienter la personne et vérifier si ce type de décision comporte un aspect discriminatoire. Mais c'est à la personne de nous le dire : notre travail n'est pas d'enquêter. On peut également citer des sujets liés aux comportements sur la dignité et sur l'image qui peuvent donner lieu aussi à des interrogations déontologiques. Sans oublier les incivilités. La palette est donc très large. Enfin, concernant les questions de harcèlement, qui sont complexes, mon rôle consistera à aider la personne à réfléchir sur l'opportunité de déposer plainte.

Avez-vous déjà étudié des dossiers ?

Nous en avons reçu cinq et nous avons défini le mode opératoire. Le mode de saisine créé privilégie la dématérialisation sur deux boîtes fonctionnelles : la boîte référent déontologie/laïcité et la boîte alerte éthique. Une secrétaire assure le suivi de sorte que je puisse lancer, si besoin, des recherches juridiques, pour ensuite assurer la réponse, qui est un avis. La première saisine date du 22 janvier et nous avons trois mois pour répondre.

Vous avez été procureur de la République de Melun. Quel souvenir gardez-vous de cette période ?

Je me souviens d'abord d'un parquet en grande difficulté avec un poste de procureur qui était vacant depuis plus de huit mois. Quand je suis nommé, je suis à la fois procureur, procureur adjoint et aussi soutien de mes substituts. C'était très formateur, car cela m'a permis d'apprendre le métier. À mon départ, nous étions à 100 % des effectifs, ce qui n'était jamais arrivé dans l'histoire de ce parquet. C'est une fierté.

D'autre part, dans le cadre de la prévention des violences urbaines, nous avions créé un groupe local de traitement de la délinquance sur la plaine du Lys (à Dammarie-les-Lys). Il fallait associer les bailleurs et faire de l'accompagnement social après la répression. Nous avons été aussi les premiers en France à lancer des stages alternatifs de sensibilisation aux dangers des produits stupéfiants pour les mineurs, avec obligation de la participation d'un des parents du mineur consommateur. J'avais fait appel à une association qui était présidée par un médecin. Lorsque vous avez affaire à des professionnels du social ou du médical, le dialogue n'est pas le même.

J'avais recruté comme délégué du procureur un ancien directeur départemental de la Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) qui, avec l'association Respect, nous organisait ces stages alternatifs. Ce dispositif était financé par les parents qui payaient le stage au tribunal. Les parents étaient désemparés, mais le fait de suivre cette journée leur permettait de reparler à leurs enfants. Aujourd'hui, la politique, c'est de contraventionnaliser, c'est-à-dire « Je paye et je continue ». Ce dispositif avait une dimension prévention et je trouve dommage que l'on ne l'ait pas généralisé. J'ai également beaucoup travaillé avec Guy Geoffroy (maire de Combs-la-Ville et président de l'association des maires de Seine-et-Marne) sur les violences conjugales. Il avait été le promoteur de différents textes et nous avions surtout priorisé le traitement pénal de ces violences à Melun.

Que retenez-vous de votre passage à la direction de Tracfin ?

C'est secret (rires). C'était la première fois qu'un magistrat était nommé directeur. Pour Michel Sapin (ministre de l'Economie de 2014 à 2017), c'était important de nommer un magistrat, car il voulait que Tracfin soit un service de renseignement spécialisé comme la DGSE ou la DGSI. Il souhaitait aussi qu'il soit dirigé par un magistrat impartial et indépendant. Ce qui impliquait d'incarner un décrochage du politique dans son fonctionnement et un renforcement des liens avec la justice pour une meilleure utilisation des notes Tracfin à des fins d'investigation. Pendant quatre ans, j'ai la faiblesse de penser que l'on a développé cette structure. Il y avait 110 personnes à mon arrivée et 170 à mon départ. Peu de services de l'Etat ont connu cette progression pendant la même période. Quand j'arrive, aussi, il y a 50 000 déclarations de soupçon par an et presque 100 000 quand je pars. Nous avons développé comme jamais les relations avec les déclarants et avec les autres services de renseignement, notamment sur le financement du terrorisme. Un groupe associatif politique d'extrême droite (Génération Identitaire) a été dissous le 3 mars en Conseil des ministres. Il y est fait notamment référence à son lien financier avec le terroriste d'extrême droite qui avait tué 58 personnes dans une mosquée en Nouvelle-Zélande en 2019.

C'est Tracfin qui avait démontré ce lien et cet élément a été repris dans le décret de dissolution. Lors de mon audition à l'Assemblée nationale, en avril 2019, j'avais dit que ce terroriste était “membre bienfaiteur” de Génération Identitaire. Le tarif d'adhésion était autour de 500 euros et lui avait versé trois fois plus. On a également développé ce que j'ai appelé la maximisation du renseignement financier. Tracfin est une “start-up administrative”. L'idée était de mieux utiliser le renseignement financier à des fins pénales. La plupart des affaires pénales de ces dix dernières années ont été concrétisées grâce à des notes Tracfin. Toutes les affaires de corruption internationale et les dossiers des biens mal acquis ont fait l'objet d'une note. Dans 25 % des enquêtes de terrorisme en France et dans 25 % des dossiers du Parquet national financier (PNF), il y a eu une note.

En quatre ans, nous avons multiplié par deux ou par trois les transmissions à l'administration fiscale. Nous avons inventé des transmissions rapides avec le “Flash fiscal”. De nouveaux domaines ont été couverts comme la fraude sociale et on a mis aussi l'accent sur la coopération internationale, notamment avec le groupe Egmont, l'équivalent pour les Cellules de renseignement financier (CRF) d'Europol ou d'Interpol. Lorsque j'arrive en 2015, il y a l'attentat du Thalys et je ne suis pas du tout satisfait de la façon dont cela se passe. Ensuite, il y a les attentats du 13 novembre. À 23 h, nous avions déjà l'identification du premier terroriste qui s'était fait exploser au Bataclan. Le lundi, nous transmettons quatre ou cinq informations au parquet antiterroriste et à la DGSI, ce qui permet de tracer financièrement certains des membres du commando. Cela ne se faisait pas avant. Nous avons mis en place une permanence opérationnelle. Ce que je retiens de Tracfin, c'est cette progression dans l'action et cette diversité. Je n'ai pas vu le temps passer à la tête de cette start-up, d'autant que je suis parti plus rapidement que je ne le souhaitais (rires).

Vous êtes perçu comme un magistrat inclassable. Cette image vous correspond-elle ?

Je préférerais le côté impartial, indépendant et professionnel. Je dis souvent en plaisantant que, sous la droite, je passais pour un homme de gauche et vice-versa. Et pourtant, je ne suis pas centriste (rires). Dans ce pays, on a du mal à comprendre qu'il peut y avoir des agents publics qui incarnent les missions en toute loyauté quel que soit le pouvoir en place. La classification droite/gauche ne veut plus dire grand-chose. Celle de conservateur/progressiste a plus de sens. La vraie question, est la suivante : les hommes sont-ils à la hauteur de la mission ? C'est un peu gaullien comme idée, mais on retrouve ça aussi chez Mendes-France. Vous avez des gens qui incarnent des parcours politiques et d'État, mais il faut faire attention : ne pas se croire propriétaire de son job. Dans l'Histoire, nous avons connu de hauts fonctionnaires qui voyaient tourner les ministres. C'étaient eux les vrais patrons. En termes de démocratie et de légitimité, ce n'est pas satisfaisant. Je suis pour la transparence, mais une transparence raisonnée, qui contribue à donner des éléments au débat public et qui rassure vis-à-vis des institutions. Les politiques ayant des convictions fortes doivent pouvoir s'appuyer sur des techniciens loyaux, compétents et efficaces. Mais ce que j'ai vu ces dernières années, c'est la confusion entre les deux : des politiques technos et des hauts fonctionnaires politiques. C'est cela qui brouille les repères.

Vous étiez sur une liste lors des élections municipales à Carcassonne, votre ville d'origine. La politique vous tente-t-elle ?

J'étais en 16e position sur une liste très œcuménique soutenue par En Marche, mais qui n'était pas une liste En marche, contrairement à ce qu'on a écrit. On a fait 8 %, mais le but était de bâtir un nouveau projet pour la ville. Il y a un vrai besoin de renouvellement à Carcassonne, mais je suis déprimé chaque fois que j'y retourne. Cette ville régresse avec des élites locales qui se répartissent les places depuis des années et des systèmes claniques de gestion de pouvoir. La politique locale m'intéresse, mais les étiquettes ont moins de sens.

Finalement, vous avez fait de la politique à votre façon…

Oui avec les idées que j'ai fait passer ici ou là pendant 25 ans pour lutter contre la criminalité organisée et le terrorisme, comme lorsque Michel Sapin annonce, le 21 novembre 2015, le plan français de renforcement du dispositif de lutte antiterroriste. Il deviendra le plan de l'Union européenne le 2 février 2016 et se décline encore aujourd'hui. On s'amuse aussi à parler beaucoup des bitcoins aujourd'hui, mais en France, dès le 1er janvier 2017, nous avions assujetti les intermédiaires de monnaie électronique aux obligations anti-blanchiment. Nous avons été les premiers à le faire en Europe. Là, je fais de la « politique » : anticipation, alerte, propositions et solutions. Lorsque j'avais proposé la création de juridictions spécialisées en matière de lutte contre le crime organisé, certains avaient ironisé au motif qu'il convenait de garder des parquets “naturels” de proximité ! Mais aujourd'hui, on reconnaît que la seule réforme un peu pertinente et d'ampleur de ces dernières années, en matière d'efficacité de la procédure pénale, c'est la création des Juridictions interrégionales spécialisées (JIRS) avec des magistrats spécialisés par la loi Perben II. C'était avant la création du Parquet national financier (PNF).

L'indépendance de la justice est remise en cause actuellement. Qu'en pensez-vous ?

On se trompe complètement de sujet. La justice au quotidien, ce n'est pas que le pénal. L'actuel garde des Sceaux (Eric Dupond-Moretti), qui a une culture du pénal, doit s'intéresser surtout à tout ce qui est civil, commercial, social, etc. L'autre vrai sujet, c'est l'organisation et la gestion des moyens. La justice est mal gérée. Un jour, il faudra avoir un garde des Sceaux qui ne veut pas donner son nom à une loi, mais à une organisation en termes de performance. Le déficit de confiance entre les citoyens et la justice ne concerne pas son indépendance.

Ça, c'est le psychodrame politico-médiatique. Quand un politique est mis en cause, il pense que c'est un complot de la justice. C'est le regard sur la justice qui est politisé. Il faut arrêter d'avoir un regard « politicien » sur ces institutions, c'est ce qui tue la justice. Il faut mieux l'organiser, la simplifier, l'expliquer et la rendre « performante » et « efficiente ». Le fond du problème, c'est que la justice fait peur aux politiques et que personne ne comprend qu'il y a un véritable intérêt à donner une vraie place au droit et à la justice. Il faudrait revenir aux fondamentaux de la séparation des pouvoirs, relire Montesquieu et reconnaître que la justice mériterait d'être un « vrai pouvoir ».

Aujourd'hui, l'autorité judiciaire n'a pas assez d'autorité et n'est pas assez judiciaire. Regardez aux États-Unis : un procureur peut essayer de faire une procédure contre le président. À un moment donné, il faut savoir ce que le peuple veut de sa justice et je trouve qu'on ne lui donne pas les éléments de débat démocratique pour qu'il fasse de vrais choix. Je ne fais pas partie de ceux qui ont crié au loup à la nomination d'un avocat comme garde des Sceaux. Je n'aime pas le corporatisme. Quand on est magistrat, on n'a pas à avoir d'états d'âme. Là où on peut en avoir, c'est plutôt sur la politique menée. Quelle est la légitimité et qu'est-ce qui a été validé ? Il manque toujours un vrai programme présidentiel sur la justice !

Une réforme est pourtant en cours…

Vous appelez ça une réforme ? C'est plutôt le retour d'expérience personnelle d'un avocat qui, pendant des années, sur son petit carnet, avait remarqué un certain nombre de trucs qui n'allaient pas. On ne peut pas travailler comme ça. Il faut un engagement politique fort, une validation démocratique et après, une mise en œuvre en y associant les représentants de toutes les organisations professionnelles. Je ne porte pas de jugement sur le fond, car dans ce qui a été annoncé, il y a des choses très intéressantes. C'est vrai, il y a une mesure qui attire l'attention, c'est celle sur la communication dans le secret des enquêtes. On propose de réduire la durée des enquêtes et aller devant le juge qui dira si on peut prolonger ou pas. Mais le vrai sujet, ce sont les moyens de la police judiciaire. Les juges et les procureurs préféreraient que cela aille vite. Que fait-on pour prioriser les moyens de la police judiciaire ? Rien ! Et tant qu'il n'y aura rien, le reste sera de l'incantation. Qu'on puisse mieux organiser la communication, développer le contradictoire, donner plus de moyens au procureur pour éviter l'exploitation politique des affaires judiciaires, c'est très bien. Mais ont-ils réfléchi là-dessus ? Non ! Il y a beaucoup de bonnes intentions, mais on n'est pas dans un cadre que je considère comme démocratique, au sens d'une légitimité assurée, après un débat public clair. Je me demande si j'ai bien fait de répondre à toutes vos questions avec transparence et en toute liberté (rire).

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