Les avocats se sont montrés très curieux de l’image qu’ils renvoyaient aux directeurs juridiques. Sur un fond de chasse gardée, certains leur ont demandé si ceux-ci souhaitaient pouvoir plaider. « Ce débat appauvrit nos professions », affirme Anne-Sophie Le Lay qui estime qu’un juriste n'a aucune valeur ajoutée à aller plaider.
Si les directeurs juridiques semblent totalement revendiquer leur droit au secret professionnel (qu’ils n’ont pas contrairement à leurs homologues anglo-saxons), ils ne souhaitent pas marcher sur les plates-bandes des avocats dont ils ont toujours besoin.
Christophe Barut a établi la liste des circonstances dans lesquelles il fait appel à un avocat :
- s’il ne sait pas faire : problème trop spécialisé
- s’il ne peut pas faire : plaider
- s’il n'a pas le temps : trop de dossiers à gérer
- s’il a besoin d'une validation supplémentaire : pour peser devant les dirigeants
Même son de cloche chez Anne-Sophie Le Lay. Elle souligne également faire systématiquement appel à un avocat quant il s’agit de droit pénal, en particulier de responsabilité pénale de l'entreprise ou de ses dirigeants.
Un bon relationnel paraît être un critère essentiel au moment de la collaboration avec un avocat. Le directeur juridique a besoin d'être écouté et rassuré. Renault impose des procédures d'appel d'offres et fait preuve d’une certaine exigence quant au choix de ses partenaires. Sa directrice juridique est intraitable sur la loyauté des cabinets d'avocats. Elle « met à la porte » tous ceux qui prendraient de haut ses juristes ou qui passeraient directement vers la direction sans communiquer avec son équipe.
Chez Dell, également adepte de la procédure d’appel d’offres, le bouche à oreilles et les expériences permettent d'inclure de nouveaux cabinets dans les panels.
Certains critères évoqués peuvent surprendre comme l’adaptation aux nouvelles technologies dont les logiciels sécurisés, et la politique RSE (responsabilité sociétale des entreprises) des cabinets. De fait, Dell comme Renault, sont sensibles aux actions environnementales, caritatives (Pro bono), paritaires, LGBT... de leurs partenaires.
Etonnement, certains critères anticipés par les avocats, comme les honoraires de résultat ou le prestige des cabinets, ne semblent pas peser beaucoup dans la balance.
En revanche, les directeurs juridiques apprécient la transparence budgétaire des avocats. Ils favorisent le système forfaitaire car il est très important pour les sociétés de savoir à l'avance ce qu'un dossier va coûter pour prévoir leur budget.
La formation d'avocat est la meilleure formation qui soit pour Christophe Barut « la formation de l’EFB est extrêmement intéressante et on voit vraiment la différence chez un juriste d’entreprise formé comme avocat et un autre qui a fait toute sa carrière dans une entreprise ». Les juristes de Dell sont presque tous des anciens avocats. Idem pour Anne-Sophie Le Lay : « c’est effectivement la meilleure formation parce que le travail, la rigueur, la gestion de certains dossiers et la façon dont les sujets sont rédigés et appréhendés sont excellents ».
D’un coté comme de l’autre, tout le monde est gagnant. Les grands cabinets y voient parfois un moyen de « placer » leurs avocats dans les grandes entreprises. A l’inverse, les directeurs juridiques avouent faire former leurs juristes juniors par les cabinets d'avocats.