Dates clés
2018 : Hélène Thirion succèdera à Florence Lampin
2015 : Elue bâtonnier
2004 : Installation en cabinet individuel
2002 : Prestation de serment
Comment se porte votre barreau ?
Le barreau de Melun est actuellement composé de 145 avocats, dont 20 sociétés d'avocats et 125 cabinets individuels. La moyenne d'âge est de 45 ans, avec une bonne majorité de femmes. Nous avons l'avantage d'exercer au sein d'un barreau à taille humaine, où tout le monde se connaît. Il s'agit également d'un barreau dynamique. Nous avons connu un rajeunissement ces dernières années.
À quoi est dû ce dynamisme ? Quelle a été votre action en la matière ?
Depuis un an et demi, différents chantiers ont été entrepris. Nous avons d'abord modernisé les moyens permettant de répondre plus efficacement aux permanences et à l'accès droit pour les justiciables. À ce titre, nous avons souscrit un contrat de services avec la société Alphadial, afin de mettre en place toutes les permanences à l'aide des logiciels Gavop et Clip'a, avec pour objectif de faciliter l'organisation des jeunes confrères sur la base du volontariat.
Nous avons aussi créé des consultations gratuites spécialisées, à la demande des justiciables et de nos partenaires. Un tiers du barreau prend en charge les permanences et la moitié de nos confrères assure des consultations gratuites dans le cadre de l'accès au droit avec le CDAD (Conseil départemental de l'accès au droit). En 2016, 3 263 justiciables ont bénéficié d'une consultation gratuite dispensée par un avocat du barreau de Melun. Nous avons également facilité le travail de l'avocat de permanence et de ses interlocuteurs, par l'utilisation d'un numéro de téléphone unique lorsqu'une personne est placée en garde à vue ou convoquée en audition libre et demande à être assistée par un avocat.
Plus largement, nous avons créé l'Institut de formation des barreaux de Seine-et-Marne. Melun, Meaux et Fontainebleau se sont réunis, dans le cadre d'une association loi 1901, pour permettre à tous les avocats du 77 et les avocats extérieurs intéressés de se former sur place. L'Institut a été inauguré en juin 2016, sur le thème « L'avocat et les victimes ». Nous avons proposé des formations très ciblées sur l'assistance des victimes au sens large.
Par ailleurs, nous avons développé deux activités parallèles dans le cadre des MARD (modes alternatifs de règlement des différends). Nous avons relancé l'association Médiation 77, qui regroupe des avocats de Seine-et-Marne. Une dizaine de confrères melunais étaient déjà formés, nous avons doublé l'effectif en proposant des formations. La médiation pousse de plus en plus la porte du tribunal. Nous essayons de favoriser les modes de règlement amiable, en matière civile et prud'homale. J'ai également été sollicitée par Sylvie Favier, présidente du tribunal administratif de Melun, pour faire de la médiation sur des contentieux administratifs ciblés. Enfin, le barreau a déjà adhéré au Marché immobilier des avocats (MIA), de sorte que les confrères peuvent exercer cette activité s'ils le souhaitent.
Cette association des trois barreaux est un prélude à leur fusion ?
Ce n'est pas dans cette optique que nous avons créé cette association, mais dans l'objectif de mutualiser la formation. Nous proposons une offre locale et à coût réduit, ce qui évite aux confrères de perdre du temps à aller sur Paris. Cela crée du lien au sein d'un barreau comme le nôtre, puisque nous pouvons nous rencontrer en dehors d'un dossier ou d'une salle d'audience. Mais cela n'est absolument pas dans l'optique de nous regrouper pour former un seul barreau de Seine-et-Marne.
Ce n'est donc pas la bonne marche à suivre ?
Je ne crois pas. La Seine-et-Marne est l'un des plus grands départements de France. Supprimer trois barreaux pour n'en faire qu'un, entraînerait corrélativement la suppression de deux TGI. Celui de Fontainebleau était sur la sellette lors de la réforme Taubira et je ne sais s'il échappera à la prochaine réforme territoriale. Melun et Meaux répondent à une attente des justiciables, qui souhaitent avoir véritablement la juridiction et l'avocat proche de leur domicile. Le département est tellement vaste que je n'imagine pas un seul TGI ou un barreau pour l'ensemble du territoire seine- et-marnais.
Quels sont vos rapports avec le barreau de Paris, dont le poids est imposant ?
Nous ne nous sentons pas vraiment écrasés par le barreau de Paris. En effet, l'installation, chaque année, voire chaque mois, de nouveaux confrères à Melun démontre que le barreau parisien est saturé et qu'il y a un réel besoin de s'éloigner de la capitale. Nous observons de manière générale plus d'ouverture de cabinet que de fermetures en Seine-et-Marne. Je crois qu'il y a de la place pour tout le monde.
Malgré tout, c'est une réalité, avec la réforme de la multi-postulation, les avocats du barreau de Paris, sur un contentieux très spécifique, peuvent se passer d'un correspondant melunais. Tous ne le font pas. Plus de la moitié des dossiers du TGI de Melun sont encore assurés par des avocats melunais, mais nous avons une présence parisienne qui est en hausse. Donc effectivement, on peut craindre que Paris envahisse ce contentieux et se passe d'un postulant melunais.
Ensuite, je crois que l'avenir est au regroupement des cabinets, il ne faut pas se leurrer. À long terme, nous devrons regrouper les structures individuelles pour être plus forts. Ce regroupement se fera soit avec les structures internes à la profession, soit par le biais de l'interprofessionnalité, avec toutes les réserves et prudences d'usage. Il faut envisager le métier par d'autres domaines d'activité (MIA et MARD notamment) et se regrouper pour proposer une offre plus importante au client, qui désire à la fois de la proximité et une large offre de services.
Vous êtes donc en faveur de l'interprofessionnalité ?
Oui, à partir du moment où notre déontologie est préservée, je n'y vois aucun inconvénient mais plutôt un avantage pour le justiciable, qui, au sein d'une même structure, aura à la fois son expert-comptable, éventuellement son notaire, et son avocat. La multiplicité des services au profit du justiciable me paraît une bonne chose. Cela fait partie de l'avenir de la profession, il ne faut pas l'éluder mais l'admettre et s'y préparer.
Quelles sont les préoccupations des avocats du 77, notamment des jeunes ?
Un jeune confrère qui s'installe a les mêmes préoccupations que les miennes il y a quinze ans, c'est-à-dire pouvoir exercer sa profession dans de bonnes conditions avec une formation suffisante. La formation à l'EFB fait l'objet de plusieurs réformes. Le jeune avocat va en réalité chercher à trouver une collaboration et se former auprès des anciens. Lorsque c'est possible, c'est le scénario parfait. Dans le cas contraire, il faut qu'il trouve impérativement une offre de formation locale.
Au barreau de Melun, nous avons mis en place le tutorat. Un jeune confrère qui arrive au barreau est encadré et peut compter sur ses confrères pour le former à l'exercice de notre belle profession.
Au-delà, la formation est prioritaire aujourd'hui…
Tout à fait, nous avons 20 heures de formationannuelle obligatoire mais il n'y a pas de sanction. Un projet de réforme en discussion consiste à omettre un confrère qui ne suivrait pas cette obligation. Cela n'est pas forcément une bonne chose, mais il faut trouver un compromis. Offrir des formations locales peut faire partie de la solution.
Êtes-vous favorable à la collaboration qualifiante ?
Oui, tout ce qui permet de compléter la formation de l'EFB me paraît souhaitable.
Que pensez-vous de l'avocat en entreprise ?
Je suis partagée. D'une part, cela permet à de jeunes confrères de trouver leur voie. D'un autre côté, je crois indispensable de préserver notre déontologie, de sorte que celle-ci s'applique y compris au sein de l'entreprise. Elle protège la profession d'avocat, et c'est ce qui fait sa force.
Comment voyez-vous l'évolution de la profession ? Son uberisation ?
Le numérique au sens large est une bonne chose pour la profession, à condition qu'il soit sous l'œil du Conseil national des barreaux. Tout ce qui se fait en dehors peut être dangereux, d'abord pour le justiciable. Nous recevons beaucoup d'entre eux ayant été confrontés à des fossoyeurs du droit. Nous devons les accueillir, avant de reprendre la procédure à zéro. Je vois là un grand danger pour le justiciable et pour la profession.
Qu'en est-il à Melun ?
Nous regardons pour l'instant ce phénomène de loin.
Comment se déroule votre collaboration avec les notaires dans le cadre de la réforme du divorce par consentement mutuel ?
Nous avons eu une réunion avec la chambre départementale des notaires pour tenter de définir le rôle de chacun. Les justiciables ont compris que le divorce ne doit pas se faire chez les notaires mais chez les avocats, en partenariat avec les notaires. Je n'ai pas de remontées négatives très précises. Certains notaires souhaiteraient que la signature se fasse au sein de leur cabinet pour différentes raisons, j'y suis fermement opposée.
Qu'attendez-vous de la Convention nationale des avocats ?
C'est un moment fort, qui donne la possibilité aux avocats de France de se croiser et d'échanger. Les stands proposent un certain nombre de services appréciables et les formations proposées sont très intéressantes, diversifiées et d'actualité. J'invite donc tous mes confrères melunais non encore inscrits à s'y rendre !