AccueilDroit & chiffreLe Conseil constitutionnel valide l'accès de l'Etat à nos données de connexion

Le Conseil constitutionnel valide l'accès de l'Etat à nos données de connexion

Le Conseil constitutionnel, saisi le 5 juin dernier par le Conseil d'État d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) posée par des associations de défense des libertés sur internet et des avocats aux conseils relative à la constitutionnalité des articles L. 246-1 à L. 246-5 du code de la sécurité intérieure (CSI), vient de valider l'accès administratif aux données de connexion des internautes dans une décision rendue le 24 juillet.
Le Conseil constitutionnel valide l'accès de l'Etat à nos données de connexion

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Le Conseil constitutionnel a été saisi d'une QPC posée par les associations French Data Network, La Quadrature du Net et la Fédération des fournisseurs d'accès à internet associatifs, ainsi que par le cabinet d’avocats aux conseils SCP Spinosi et Sureau, relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des articles L. 246-1 à L. 246-5 du code de la sécurité intérieure.

Ces articles fixent les règles qui régissent l'accès aux données de connexion par l'autorité administrative. Elles sont modifiées par la loi relative au renseignement adoptée définitivement ce 24 juin, mais resteront applicables jusqu'à l'adoption des mesures réglementaires prévues par l'article 26 de la loi précitée.

Les associations requérantes reprochaient, en premier lieu, au législateur d'avoir employé à l'article L. 246-1 les termes d' « informations ou documents » et ceux d' « opérateur de communications électroniques », de sorte que les données de connexion seraient définies de façon trop imprécise. Elles faisaient en outre valoir que l'utilisation, à l'article L. 246-3, des termes « sollicitation du réseau » n'exclut pas un accès direct de l'autorité administrative aux données de connexion détenues par les opérateurs. Les associations requérantes se plaçaient sur les fondements de l'incompétence négative et du droit au respect de la vie privée.

Les associations requérantes soutenaient, en second lieu, que le législateur, en ne prévoyant pas des garanties spécifiques de nature à protéger l'accès aux données de connexion des avocats et des journalistes, a méconnu l'étendue de sa compétence dans des conditions portant atteinte au droit au respect de la vie privée, à la liberté d'expression et de communication, ainsi qu'aux droits de la défense et au droit à un procès équitable, au droit au secret des échanges et correspondances des avocats et au droit au secret des sources des journalistes.

Compte tenu des griefs formulés, le Conseil constitutionnel a considéré que la question prioritaire de constitutionnalité portait uniquement sur les articles L. 246-1 et L. 246-3 du CSI.

S'agissant de la première partie de l'argumentation des associations requérantes, le Conseil constitutionnel, se fondant sur les dispositions de l'article L. 34-1 du code des postes et communications électroniques et sur le paragraphe II de l'article 6 de la loi du 21 juin 2004, a jugé, d'une part, que les données de connexion ne peuvent en aucun cas porter sur le contenu des correspondances échangées ou des informations consultées dans le cadre de ces communications électroniques, et d'autre part, que le législateur avait suffisamment défini celles-ci.

En ce qui concerne la notion de « sollicitation du réseau », le Conseil constitutionnel a constaté qu'il résulte de l'article L. 246-1 du code de la sécurité intérieure que les données de connexion requises sont transmises par les opérateurs aux autorités administratives compétentes, et que, selon l'article L. 246-3, lorsque les données de connexion sont transmises en temps réel à l'autorité administrative, celles-ci ne peuvent être recueillies qu'après sollicitation de son réseau par l'opérateur lui-même. Le Conseil constitutionnel en a conclu qu'il résulte de ces textes que les autorités administratives ne peuvent accéder directement au réseau des opérateurs dans le cadre de la procédure prévue aux articles L. 246-1 et L. 246-3. Dans ces conditions, il a jugé que le législateur n'avait pas méconnu l'étendue de sa compétence dans la définition des termes relatifs à l'accès aux données de connexion.

Sur la seconde partie de l'argumentation des associations requérantes, le Conseil constitutionnel a d'abord jugé que, dans la mesure où les dispositions contestées instituent une procédure de réquisition administrative de données de connexion excluant l'accès au contenu des correspondances, elles ne sauraient méconnaître le droit au secret des correspondances et la liberté d'expression.

Par ailleurs, le Conseil constitutionnel a relevé qu'outre qu'elle ne peut porter sur le contenu de correspondances, la procédure de réquisition administrative résultant des dispositions contestées est autorisée uniquement pour recueillir des renseignements intéressant la sécurité nationale, la sauvegarde des éléments essentiels du potentiel scientifique et économique de la France ou la prévention du terrorisme, de la criminalité et de la délinquance organisées et de la reconstitution ou du maintien de groupements dissous. Il a également rappelé dans sa décision, notamment, que cette procédure est mise en œuvre par des agents spécialement habilités, qu'elle est subordonnée à l'accord préalable d'une personnalité qualifiée, placée auprès du Premier ministre, désignée par la commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité (CNCIS), qu'elle est soumise au contrôle de cette commission, laquelle dispose d'un accès permanent au dispositif de recueil des informations ou documents. Le Conseil constitutionnel en a déduit que le législateur a prévu des garanties suffisantes afin qu'il ne résulte pas de la procédure prévue aux articles L. 246-1 et L. 246-3 du code de la sécurité intérieure une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée, aux droits de la défense et au droit à un procès équitable, y compris pour les avocats et journalistes.

Le Conseil constitutionnel a, en conséquence, écarté le grief tiré de ce que le législateur aurait insuffisamment exercé sa compétence en ne prévoyant pas des garanties spécifiques pour protéger le secret professionnel des avocats et journalistes.

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