Ces chiffres confirment la grande utilité du fret fluvial, alternative crédible à la route. C’est déjà une réalité en Île-de-France et plus particulièrement en Seine-et-Marne, territoires mis à contribution par le chantier géant du Grand Paris Express (GPE).
C’est aussi l’une des missions de Voies navigables de France (VNF), établissement public chargé notamment de la transition écologique dans le secteur du fluvial et gérant un réseau de 6 700 kilomètres. Après avoir investi plus de 330 millions d’euros en 2022, VNF dispose, cette année, d’une enveloppe de 340 millions d’euros pour entretenir et moderniser ses infrastructures. Et si le transport fluvial était devenu une priorité pour atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050 ?
Un réseau départemental dense
Le réseau fluvial seine-et-marnais est dense et varié. Long de 330 kilomètres, il comprend un fleuve (la Seine, 95 km), deux rivières (la Marne, 88 km, et l’Yonne, 16 km) et deux canaux (le Loing, 53 km, et l’Ourcq, 110 km). Dotée de nombreuses installations portuaires, ainsi que d’ouvrages d’art, de haltes et d’accès, la Seine-et-Marne offre de multiples opportunités en matière de tourisme, mais aussi de transport fluvial. Si la Marne et le canal du Loing sont navigables, c’est la Seine qui assure l’essentiel du trafic fluvial dans le département. Le principal port de commerce est situé à Montereau-Fault-Yonne et il existe 61 entreprises locales spécialisées dans le fret fluvial.
Un atout écologique
Reconnu pour ses faibles émissions de CO2, le transport fluvial épouse parfaitement les enjeux environnementaux. Ce mode de transport émet, en effet, jusqu’à cinq fois moins de CO2 que le routier pour une tonne transportée. Gaz réseau distribution de France (GRDF) l’a d’ailleurs bien compris. Dans le cadre du “Green Deal“ de la Région Île-de-France, ce distributeur accompagne les projets de remotorisation au biométhane (BioGNV) des flottes fluviales franciliennes en se mobilisant auprès de la Communauté portuaire de Paris (CPP). L’objectif est d’accélérer la transition écologique du transport fluvial, en faisant de la Seine une voie de développement pilote du “fluvial vert“ d’ici 2024, année des Jeux olympiques et paralympiques et de l’extension de la zone à faible émission (ZFE).
Un projet d’envergure
Lancé en 2011 et porté par Voies navigables de France, le projet de liaison fluviale Bray-Nogent, entre la Seine-et-Marne et l’Aube, peut contribuer à l’essor du fret fluvial. Il a franchi une étape décisive l’année dernière en faisant l’objet d’une déclaration d’utilité publique (DUP). Dès que l’autorisation environnementale unique (AEU) aura été accordée et qu’une nouvelle enquête publique aura été organisée, VNF pourra alors lancer les travaux en 2025. En augmentant ainsi le gabarit de navigation sur 28,5 km, cette liaison Bray-Nogent va permettre d’assurer une continuité de l’axe de navigation pour les bateaux de 2 500 tonnes, depuis les ports du Havre et de Rouen, jusqu’à Nogent-sur-Seine. La croissance du trafic fluvial, freinée jusque-là sur une partie de la Seine en amont de Paris (avec des bateaux ne pouvant excéder 650 tonnes), va s’en trouver accélérée et pérennisée. Concrètement, le projet consiste à approfondir le chenal de navigation sur la Seine naviguée, de 19,25 km environ, tout en construisant un nouveau canal à grand gabarit de 9,20 km environ (4,30 m de profondeur et 60 m de largeur). L’écluse de Jaulnes, en Seine-et-Marne, sera également reconstruite à cette occasion.
Gérer la sécheresse
« Pour que les bateaux passent sur l’eau, il faut que l’eau passe sous les bateaux », résume joliment Thierry Guimbaud, directeur général de Voies navigables de France. La situation actuelle, provoquée par une sécheresse hivernale inattendue, est suivie de près par VNF, ainsi que par son partenaire de Seine Grands Lacs, autre opérateur public. La gestion hydrique est, en effet, devenue un enjeu majeur. Si la sécheresse de l’été 2022 n’a pas fortement impacté les installations (98 % d’entre elles ont fonctionné sur les réseaux grands gabarits et 85 % sur les petits), la vigilance reste de mise pour cet été. Chez VNF, on réunit ainsi une cellule de crise tous les 15 jours depuis début février. « Le maintien de nos capacités d’investissement doit nous permettre de stabiliser notre action en faveur du réseau fluvial qui irrigue les territoires et participe directement aux objectifs de planification écologiques du pays. Nous menons un vaste programme de rénovation, afin d’optimiser la gestion de l’eau pour mieux maîtriser les risques et garantir la fiabilité de nos ouvrages », précise Thierry Guimbaud. « Nous faisons tout notre possible pour économiser l’eau. Si la situation devait se compliquer, des mesures complémentaires sont d’ores et déjà identifiées », ajoute Sacha Rybaltchenko, adjoint au chef de la Seine amont chez VNF.
Des travaux indispensables
La Seine-et-Marne n’échappe pas à cette restructuration. « Depuis 10 ans, une action est menée sur les écluses secondaires en mauvais état. Nous venons de finir de rénover celle située à proximité de Bois-le-Roi et l’écluse de Champagne-sur-Seine, la plus en amont de la Seine, sera prête à la fin de l’année. Nous souhaitons que le trafic fluvial, le fret en particulier, puisse augmenter sur les itinéraires que nous gérons », assure Sacha Rybaltchenko. Pour favoriser la stabilisation de ses ouvrages et les rendre plus performants, VNF s’emploie notamment à développer la fibre optique, afin d’éviter certaines zones critiques de la Seine comme le secteur Varennes-sur-Seine-Le Coudray-Montceaux (Essonne). Ce chantier va débuter prochainement sur la partie fluviale, parallèlement à celui de la télé-conduite, dont la mise en œuvre entre les deux communes est programmée pour la fin 2024. L’objectif est de connecter les ouvrages entre eux et de les piloter à distance. Ce système fonctionne déjà sur le secteur de Marcilly, à Montereau. En matière de transport fluvial, Voies navigables de France tient bon la barre en Seine-et-Marne.
Le barrage de Meaux en reconstruction
Dans le cadre de sa politique de régénération de ses infrastructures, de développement des énergies renouvelables et de préservation de la biodiversité, Voies navigables de France (VNF) a engagé pour la période 2020-2025 la reconstruction du barrage de Meaux et de ses équipements avec un système complètement automatisé. Ce barrage, qui date de 1939 et présente des problèmes récurrents de vétusté, soutient le niveau d’eau sur 22 kilomètres, de Meaux jusqu’au barrage d’Isle-les-Meldeuses. Il garantit de nombreux usages : navigation fluviale, approvisionnement en eau potable, soutien des nappes phréatiques en été, activités nautiques et maintien de la biodiversité aquatique. Une centrale hydroélectrique, dotée de quatre turbines, sera ainsi construite pour une distribution maximale équivalant à la consommation de
2 070 foyers. Le canal du Cornillon sera réaménagé en passe-à-poissons multi-espèces, afin de favoriser leur circulation migratoire et leur reproduction dans la Marne. Enfin, en rive gauche du canal, un espace vert verra le jour début 2024 pour les promeneurs.