Le point avec Margot Cantero, la directrice territoriale de Pôle emploi dans le département.
Le Moniteur de Seine-et-Marne : Quels sont les principaux enseignements de cette nouvelle enquête consacrée aux besoins en main-d’œuvre (BMO) ?
Margot Cantero : Nous avons eu un bon niveau de réponses avec près de huit mille entreprises qui ont répondu à notre enquête cette année, soit 25, 1 % de taux de retour. On note une stabilité des prévisions d’embauche avec 43 631 projets, soit 8, 3 % des intentions de recrutement en Île-de-France. 57, 2 % des entreprises envisagent des difficultés de recrutement, soit une augmentation de ce ressenti de 8, 7 % par rapport à 2022. Enfin, les services continuent d’être les gros recruteurs du département avec 67 % des projets. Les services aux particuliers (aide à domicile, restauration, santé ou employés de ménage) continuent de tirer les besoins en recrutement.
Comment caractérisez-vous le marché du travail en Seine-et-Marne ?
A l’instar de la région Île-de-France, il reste dynamique. Même si les secteurs des services restent les gros pourvoyeurs d’offres, on peut aussi noter que tous les secteurs annoncent des besoins en recrutement comme le transport et la logistique (près de 3 500), la santé (4 850) et le BTP (6 910). De plus, les opportunités d’emploi des autres départements, notamment de Paris, sont aussi accessibles aux Seine-et-Marnais. Le secteur de la sécurité privée est aussi en forte expansion avec plus de 15 000 besoins.
Le nombre d’offres d’emploi apparaît-il suffisant ?
En 2022, plus de 50 000 offres ont été confiées à Pôle emploi Seine-et-Marne et nous savons que les recrutements sont toujours plus importants que les besoins exprimés. Nous devrions être sur le même volume cette année. En agrégeant les offres de nos partenaires, 168 000 offres ont été publiées sur notre site (www.poleemploi.fr) en 2022. Ce sont autant d’opportunités pour les Seine-et-Marnais.
Les secteurs et les métiers en tension constituent-ils toujours la principale préoccupation ?
Comme au plan national, les difficultés de recrutement envisagées par les entreprises demeurent élevées. Nous avons toutefois largement diversifié nos méthodes de recrutement à travers notamment le sport avec le dispositif “Stade vers l’emploi”, la formation en entreprise ou encore la mesure des habilités des personnes sans expérience ou diplôme dans un métier donné. Même si nous démultiplions les informations, notre offre de service reste peut-être encore méconnue. Je ne peux donc que conseiller aux recruteurs de contacter leur agence Pôle emploi au 3995 (numéro qui permet de joindre une équipe de conseillers dédiée à l’entreprise), afin de trouver des solutions adaptées. Enfin, nous avons formé plus de 12 000 personnes en 2022 et nous allons poursuivre cet effort notamment avec des formations sur les métiers en tension. Nous les achetons au regard des besoins des entreprises et l’étude BMO est aussi un outil qui sert à identifier ces besoins.
Quels sont les cinq métiers qui recrutent le plus ?
- Employés polyvalents de restauration avec plus de deux mille intentions d’embauche.
- Agents d’entretien des locaux (1 500).
- Aides à domicile et ménagères (1 500).
- Ouvriers du second œuvre (1 300).
- Transport et logistique avec deux métiers en particulier qui totalisent plus de deux mille intentions d’embauche : chauffeurs routiers et ouvriers de l’emballage et de la manutention.
Quel rôle les TPE-PME peuvent-elles jouer ?
Comme les plus grandes ou les plus petites entreprises, je leur conseille de prendre contact avec leur agence Pôle emploi. Nous n’avons pas de baguette magique, mais des solutions que nous adaptons aux besoins spécifiques des entreprises. De plus, nos équipes sont en capacité de situer leurs offres sur le marché du travail. Il est important de savoir comment se situe votre offre par rapport au niveau de salaire, des exigences ou des conditions de travail. Aujourd’hui, les demandeurs d’emploi ont le choix et mettent donc les entreprises en concurrence. Déposer une offre et la rendre attractive n’est plus suffisant. Il faut identifier les compétences réellement nécessaires. L’aide de nos conseillers est appréciée par près de 90 % des entreprises.
Comment abordez-vous la future réforme baptisée “France Travail“ envisagée par le gouvernement ?
Nous partageons pleinement le constat selon lequel nous sommes actuellement confrontés à des paradoxes ressentis de manière de plus en plus forte par les citoyens. De nombreux acteurs de l’emploi et de l’insertion travaillent trop souvent en silo et ne possèdent pas une vision complète de la situation des personnes qu’ils accompagnent. Résultat : ces personnes, qui peuvent rencontrer également des problèmes de formation, de logement, de mobilité ou de garde d’enfants, subissent la complexité de notre système et se retrouvent avec un accompagnement inadapté voire parfois inexistant. Le taux de chômage est historiquement bas, mais des tensions de recrutement persistent, alors que, dans le même temps, des millions de personnes restent sans emploi.
Quelles vont être les grandes lignes de ce changement ?
L’idée est d’aller davantage au-devant des personnes sans emploi et de leur offrir des parcours d’accompagnement sans coupure ni rupture, plus adaptés et plus intensifs, notamment pour les bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA). Il faut également aller au-devant des besoins des entreprises, notamment les TPE-PME, de manière concertée. Tout cela va impliquer une évolution majeure, mais les transformations que nous avons menées ces dernières années (offre de services, stratégie en matière de partenariats à l’instar du rapprochement réussi avec Cap emploi) nous permettent d’aborder cette réforme en toute confiance.
BMO, mode d’emploi
L’enquête annuelle “Besoins en main-d’œuvre“ (BMO), initiée par Pôle emploi, présente les intentions de recrutement des employeurs. Outil d’aide à la décision, cette étude apporte un éclairage inédit sur les attentes et les difficultés rencontrées par les entreprises en matière de recrutement. Réalisée par l’envoi postal d’un questionnaire, l’enquête est déclinée au niveau national, par région, par département et par bassin d’emploi. Elle présente ainsi une approche par métiers détaillés et par secteur d’activité.
Ses résultats prennent en compte tous les types de recrutement, y compris les postes à temps partiel, l’intérim et
l’emploi saisonnier (créations de postes ou remplacements).
En Île-de-France, 351 405 entreprises ont été interrogées sur leurs intentions d’embauche pour l’année 2023. Plus de 69 250 établissements (représentant 25 bassins d’emploi) ont répondu au questionnaire, soit un taux de retour de 19, 7 %.